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Extrait du tome 3

Nous voici un mois pile après le début du confinement.

Que diriez-vous de découvrir quelques extraits du troisième tome du conte des sept Chants (en cours d'écriture) ?

- Attention, pour les âmes sensibles, on est dans un tome plus sombre et ces morceaux choisis peuvent être difficiles à lire (je vous aurai prévenus !)

- Ah, et je m'excuse d'emblée pour les fautes : c'est un premier jet non corrigé !


[Elle désigna d’un geste dédaigneux les deux marches qui menaient à la chaire de granit, et à ses pieds. Arnfag les poussa rudement, comme ils hésitaient à s’approcher d’elle, ce qui la fit rire. Le fenrik et le sorcier prirent place sur les degrés de pierre, sans piper mot, et se tassèrent l’un contre l’autre, aussi éloignés d’elle que possible. Le loup, lui, ne bougeait pas une oreille, attendant servilement les ordres. Quelques minutes plus tard, une large pierre plate, épaisse d’une vingtaine de centimètres et assez grande pour accueillir un bolgoth avait été déposée au centre de la pièce. Une rainure courrait sur son pourtour, percée de six gouttières qui donnaient sur l’extérieur. Six vasques de terre cuite furent disposées sous les gouttières. Dix trépieds de fer forgé, soutenant chacun une coupe de bois d’une vingtaine de centimètres de diamètre, furent installés de part et d’autre de la pierre, cinq d’un côté et cinq de l’autre. Enfin, un sorcier maar vêtu d’un large manteau à capuchon profond et porteur d’un masque lisse et noir s’avança, une longue lame courbe posée à plat sur ses mains.]


[Quand tout fut prêt, les portes s’ouvrirent sur six bolgoths qui encadraient dix fillettes humaines dont la plus vieille ne devait pas avoir six ans. Elles étaient attachées toutes ensemble par des colliers à une longue chaîne. Sales et nues, cependant à l’instar des humains qu’Edoran avait déjà pu voir dans les camps d’engraissement, elles semblaient en bonne santé. Cela n’avait rien d’étonnant, compte tenu du fait que ces gens constituaient l’essentiel du régime alimentaire des maars. Soudain, la vue des fillettes et le souvenir des camps allumèrent la mémoire du lycante. Lorsqu’ils avaient arpenté Evinshorsk, Thésis et lui, et découvert les élevages de viande humaine, ils avaient entendu des gardes évoquer le goût particulier de la « sorcière » pour les bébés femelles. Ceux-ci avaient eu l’air choqué et effrayé de la quantité qu’elle « consommait » alors qu’apparemment, elle ne les mangeait même pas. Revenant à la scène qui s’exécutait sous ses yeux, Edoran comprit qu’il allait découvrir le fin mot de cette histoire… et il n’en avait pas la moindre envie.

Les bolgoths séparèrent les petites filles les unes des autres, puis les enchaînèrent chacune à l’un des dix trépieds. Quand cela fut fait, Xinthia Laska quitta son trône, descendit les marches de l’estrade et se positionna face à la pierre, surplombant la tête du loup. D’un geste, elle décrocha l’attache de sa robe de fer qui tomba à ses pieds, dévoilant un corps sensuel et terrifiant. Des centaines de griffures et d’estafilades sanguinolentes zébraient sa peau, suintant le long de ses courbes érotiques. Lentement, elle leva et écarta les bras de part et d’autre de ses épaules, paumes vers le haut, puis elle se mit à psalmodier d’une voix forte dans une langue sombre aux accents rocailleux. Aussitôt, deux des bolgoths s’emparèrent de l’une des fillettes, qui ne réagit pas. Ces enfants étaient-elles droguées ? Ou l’horreur de leur vie les avait-elle déconnectées de la réalité ? Alors que l’un d’eux, dont les défenses jaunâtres indiquaient qu’il était plus vieux que l’autre, maintenait la fillette tête en bas au-dessus du corps du loup, le plus jeune immobilisait fermement sa petite tête entre ses mains, larges comme des battoirs. Le sorcier masqué s’avança, brandissant la lame courbe, et d’un geste élégant, trancha la tête de la fillette. Aussitôt, le bolgoth qui la tenait alla déposer celle-ci, crâne vers le bas, sur le trépied d’où il avait détaché l’enfant. L’autre, pendant ce temps, maintenait le petit cadavre à l’aplomb du corps du loup de manière que tout le sang de la victime se déverse sur lui.

Le sang de la fillette, après avoir inondé la bête et la table de pierre, coulait dans la rigole et empruntait les gouttières, avant d’être récupéré dans les jattes de terre cuite. L’odeur insupportable de l’hémoglobine, mêlée à l’huile des braseros, saturait l’atmosphère. Bohr se sentait suffoquer et Xano luttait contre la nausée. Tout ce sang ! Même pour eux, qui étaient nés et avaient grandi en Evinshorsk, c’était écœurant.

Le sacrifice recommença de la même manière… dix fois de suite. Les petites filles, les unes après les autres, se voyaient retirer leur collier pour se faire décapiter, tête en bas, par le sorcier masqué pendant que Xinthia Laska psalmodiait de plus en plus fort. Dix fois le sang chaud s’écoula sur la fourrure poisseuse et imbibée du loup.]


[Quand la dernière des dix petites filles eut été asséchée de son fluide vital, que la dernière goutte de sang, après avoir baigné le corps étendu sur la pierre, eut rejoint l’une des jattes de terre cuite et que la dernière petite tête eût été déposée sur le dernier trépied, Xinthia Laska cessa son invocation. Elle laissa retomber ses bras le long de son corps et, vidée de ses forces, vacilla sur ses jambes. Arnfag se porta aussitôt à ses côtés pour la soutenir. Il la guida vers le plus proche des trépieds puis recula à distance prudente. La sorcière plongea les mains dans le petit crâne, recueillant le cerveau encore tiède de la première enfant et le porta à sa bouche. Consciencieusement, elle absorba, mâcha et avala l’organe gélatineux, ce qui sembla aussitôt la ragaillardir. Sans attendre, elle passa rapidement au trépied suivant et dégusta pareillement la seconde cervelle, puis la troisième et ainsi jusqu’à la dixième. Pendant ce temps, les bolgoths avaient empilé les petits corps dans un coin de la pièce et s’appliquaient désormais à remuer le sang dans les coupes de terre cuite afin qu’il ne fige pas. Le sorcier masqué avait nettoyé sa précieuse lame et passait à présent derrière les bolgoths agenouillés pour jeter des herbes séchées dans les jattes, dont le contenu se mettait à luire.

Après s’être outrageusement restaurée, Xinthia Laska reprit sa position à l’aplomb du loup… qui n’avait toujours pas changé de forme. L’absorption de matière grise, de ce type très particulier de substance cérébrale, celle de très jeunes humains de sexe féminin, produisait un effet incroyable sur la sorcière. Elle paraissait avoir rajeunit de dix ans, toutes ses plaies avaient cicatrisé et sa peau lumineuse resplendissait. Ses cheveux rougeoyaient dans la pénombre comme un brasier. Elle était belle comme la nuit, puissante comme les étoiles, et aussi terrifiante qu’un trou noir.

Pour la seconde fois, elle écarta les bras à hauteur de ses épaules, paumes vers le haut, et se remit à psalmodier. Les mots, différents cette fois, sonnaient comme des ordres plus que comme une prière. Tranchants et durs, ils heurtaient les oreilles de l’assistance, qui ne pipait mot. Sur un signe du sorcier masqué, les bolgoths se relevèrent et, l’un après l’autre, vinrent déverser sur la sorcière le contenu des calices de terre. Alors qu’elle poursuivait son invocation, couverte de la tête aux pieds de ce sang légèrement luminescent, le corps du loup se mit à luire de la même manière, puis à convulser, de plus en plus violemment. Sous l’effet du rituel, la mutation forcée provoquait un réajustement des os et des chairs qui, en temps normal, s’accomplissait sans la moindre douleur, juste le temps d’un souffle. Cette métamorphose-là tordait le corps en tous sens, s’opérait dans la violence et la contrainte.]


[Le calvaire dura plusieurs longues minutes, au terme desquelles un lycante au physique splendide, puissant, aux muscles déliés et aux traits sauvages et séduisants reposait sur la longue pierre plate où s’était trouvée une bête poilue un instant plus tôt. Il respirait fort, de manière heurtée, pénible, mais il respirait. Il ouvrit les yeux, leva les mains devant son visage, les tourna sur elles-mêmes afin de les admirer, puis parti d’un gigantesque éclat de rire. La sorcière l’observait, un air émerveillé et concupiscent dans le regard. Elle ne s’était pas attendue à ce qu’il soit aussi attirant, sous cette forme et mille pensées lubriques s’agitaient soudain dans son crâne. Ô comme elle avait bien fait de le prendre pour esclave…

Tranquillement, de sa démarche chaloupée et sinueuse, elle s’approcha du catafalque, grimpa dessus et s’installa à califourchon sur les cuisses de son nouveau jouet. Tous deux étant couverts du sang des innocentes, elle plaça ses deux paumes sur l’abdomen du lycante et se mit à le caresser, étalant le liquide rouge sur son torse, ses épaules, ses flancs, son sexe… puis elle lui prit les mains pour les poser à plat sur sa propre peau et l’incita à l’imiter. Leurs caresses mutuelles les emportèrent rapidement vers une excitation qu’ils assouvirent en une danse sauvage sous les yeux impassibles ou choqués de l’assistance. Après quoi, repue, la sorcière ordonna que son esclave soit lavé, nourri puis attaché aux montants de son lit. Sans un autre regard pour lui, elle désigna Xano et Bohr à Arnfag, puis elle quitta la pièce.]


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